Laurent WHALE - Les Pilleurs d'Âmes

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Nébal
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Laurent WHALE - Les Pilleurs d'Âmes

Messagepar Nébal » 18 janvier 2011 à 14:15

Hop !

De temps en temps, moi [...], j’aime bien me faire un petit roman de gare, ne prêtant qu’au divertissement (ce qui est prêter beaucoup, à en croire le procureur de la République Desproges française). C’est comme ça que j’avais déjà eu l’occasion de lire un roman de Laurent Whale, en l’occurrence Le Chant des psychomorphes, paru chez Rivière Blanche, maison d’édition dans l’ensemble spécialisée dans ce genre de littérature. Ce roman avait en effet tout du roman de gare, mais presque à l’excès, aurais-je envie de dire : je savais, une fois tournée la dernière page, que j’avais passé un assez agréable moment à le lire… mais j’étais d’ores et déjà incapable de dire de quoi ça pouvait bien parler. Ce qui est un peu embêtant, tout de même.

Puis est apparue la maison d’édition Ad Astra, dont le premier roman fut Les Pilleurs d’Âmes de Laurent Whale. Une bonne occasion de renouer avec cet auteur, en espérant que l’expérience soit cette fois un peu plus marquante… Allez, hop.

Premier constat : la flibuste est décidément à la mode (pour n’en citer qu’un exemple récent, mais le plus éloquent, voyez Le Déchronologue de Stéphane Beauverger). Laurent Whale, dans Les Pilleurs d’Âmes, a en effet choisi de mêler aventures maritimes riches en faits de piraterie et science-fiction très classique, pour ne pas dire vancienne (mais pourquoi ne le dirait-on pas, après tout ?).

Résumons un peu la chose. Nous sommes en 1666 (ta-dan !) sur la planète Terre, comme nous l’appelons, ou plus exactement sur T024. Yoran Le Goff – de son vrai nom Karban – est un extraterrestre, agent du service Contre-Imix. Secondé par son fidèle vaisseau Kraal, il a pour tâche de débusquer un mystérieux « recruteur » au service des Cartels, venu sur Terre pour s’emparer d’individus dangereux et les mettre au service de la puissante flotte desdits Cartels. Yoran fait ainsi la rencontre du sympathique Bras-de-Fer et, grâce à lui, s’engage à bord de la flotte de l’Amiral de la Tortue, Jean-David Nau dit l’Olonnais, qu’il suppose être la cible prioritaire du « recruteur ». Il faut dire que l’Olonnais est ce qui se fait de mieux en matière de flibustier, et qu’il ne manque pas une occasion de le démontrer… Mais débusquer le « recruteur » s’annonce une tâche pour le moins difficile pour notre héros, qui, en attendant, se voit contraint de vivre la périlleuse vie des flibustiers de la seconde moitié du XVIIe siècle…

Alors, alors.

Commençons par le positif. Deux points.

Tout d’abord, certains personnages sont très bien campés. Bras-de-Fer, loin de n’être qu’un simple faire-valoir pour Yoran Le Goff, est doté d’un solide charisme, et est une fripouille éminemment sympathique. Quant à l’Olonnais, il fait un « méchant » parfait, bigger than life, d’une stature et d’une majesté hors de toute comparaison. Certains seconds rôles sont également corrects, comme le médecin Oexmelin.

Ensuite – mais cela découle en partie du premier point –, Laurent Whale sait dépeindre avec un certain réalisme, et, surtout, une certaine honnêteté, le quotidien de la flibuste. Il n’y a pas dans Les Pilleurs d’Âmes, comme trop souvent dans ce genre de romans, d’idéalisation de la piraterie. Les flibustiers sont présentés pour ce qu’ils sont : des voleurs, des violeurs, des assassins, bref, des gens pas très fréquentables, tout de même. Plutôt répugnants, en fin de compte. Et c’est bien le dégoût devant les exactions de l’Olonnais et de ses sbires qui triomphera en définitive, sans que l’on puisse pour autant accuser le roman de verser dans un excès de moralisme ; simplement, il faudrait être aveugle pour continuer d’idolâtrer la piraterie après ces pages et ces pages de pillage, de massacre, de torture et de supplice…

Voilà pour le positif. Hélas, c’est bien le négatif qui l’emporte…

Déjà, l’histoire pose problème. Le résumé que j’en ai fait vous a peut-être paru confus, mais c’est pire dans le roman, qui ne lâche les éléments qu’au fur et à mesure, et comme à regret. Peut-être, tout simplement, parce que l’auteur a conscience que son canevas, que ce qui justifie son aventure maritime teintée de SF, ne tient tout simplement pas la route ? En tout cas, on ne croit pas à l’action censément néfaste de ces « recruteurs », pas plus qu’on ne croit à l’action inverse des agents du Contre-Imix. Honnêtement, tout ça pour ça ? Les embrouilles politiques space-op’ qui viennent de temps en temps parasiter l’intrigue terrestre font d’autant plus l’effet de pièces rapportées sans intérêt… Non, on n’y croit tout simplement pas.

Il y a ensuite un problème dans la manière de raconter l’histoire. La plupart du temps, le point de vue adopté est celui, à la première personne, de Yoran Le Goff. Bon, très bien, pas de problème. Mais, de temps à autre, sans aucune régularité, comme par magie, hop ! on passe à un autre point de vue, sans que rien dans l’histoire ne vienne le justifier. Il en résulte une impression de maladresse là encore assez fâcheuse.

De même pour ce qui est du style. Disons-le tout net : on a lu bien pire. Mais on a assurément lu bien meilleur… Là encore, certaines ruptures de ton et autres maladresses du même genre nuisent au plaisir de lecture.

J’ajouterai que, pour un roman qui se veut divertissant avant tout, Les Pilleurs d’Âmes est à plusieurs reprises – notamment, c’est un comble, lors des très répétitives et bavardes scènes d’action ! – d’un ennui mortel… Même pour ce qui est du pur divertissement, on renverra donc plutôt le lecteur au Déchronologue, qui a pourtant d’autres ambitions…

Dernier point, enfin – mais là c’est le jeune éditeur qui est visé, pas l’auteur : le bouquin est littéralement saturé de coquilles et autres fôtes d’otogaffe et de granmère, ce qui nuit là encore pas mal au confort de lecture (en tout cas pour les nazis de la fôte comme moi) ; d’habitude, je fais l’effort de les relever, mais là, il y en avait tellement que j’ai vite baissé les bras…

Au final ? Ben, bof, bof, bof… Il y avait de la matière à un bon divertissement, quelques atouts indéniables, mais les défauts l’emportent tout aussi indéniablement sur les qualités. Pas terrible, donc, et même plutôt mauvais. On n’en conseillera pas la lecture, et on espère que l’auteur comme l’éditeur sauront nous réserver de meilleures choses pour la suite.
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Re: Laurent WHALE - Les Pilleurs d'Âmes

Messagepar ubikD » 18 janvier 2011 à 16:26

Que le grand cric me croque !

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